Je hais les baby boomers. Parce que je suis trop jeune pour en faire partie. Parce que je suis trop âgée pour qu'ils appartiennent à l'Histoire. Cette génération d'après guerre a eu sans effort tout ce qu'y m'a échappé après m'être battue.
Pourquoi cette accroche ? Elle fait suite à une série de commentaires facebookiens (oui, j'avoue, je délaisse ce blog pour FB) sur l'état de la recherche en France. Le Piou m'assène que je n'ai que ce que je mérite (faible salaire, conditions de travail déplorables, pas de reconnaissance sociétale et j'en passe la liste serait longue), je n'avais qu'à partir aux US.
Certes. Mais les US, j'y suis allée (bien avant lui). Et je suis rentrée en France.
Pourquoi ?
Pour des raisons qui à l'aube de 2011 sont totalement ringardes.
En premier lieu, parce qu'il me semblait devoir quelque chose à notre pays. Après tout, c'est la Nation entière qui avait financé ma thèse, et plus précisément, qui avait permis à une fille d'ouvrier d'obtenir le plus haut diplôme décerné dans notre pays. Oui, je me sentais redevable. Oui, participer à l'effort collectif permettant de faire progresser la connaissance sous couvert de statut d'état me semblait honorable et redevable.
Je suis la reine des pommes ....
Quelques années plus tard, ceux là même que j'ai formé me méprisent et me disent que je n'ai que ce que je mérite, à savoir pas grand'chose.
Ni reconnaissance sociétale, ni salaire, ni honneur. Rien que le mépris d'une société qui évalue en fonction du poids salarial ou du prestige people-esque. Autant dire que quand on évolue dans le milieu de la recherche, on est juste un objet de ricanement (au mieux) ou de mépris.
Mais qu'en est-il de ceux qui sont à l'origine de ce post, les bénis générationnels, les baby-boomers ?
Pour le chercheur cinquantenaire, c'est un cauchemar. Ils sont au pouvoir selon des règles que nous n'avons jamais connu, et nous imposent des règles qu'ils n'auraient jamais rempli (post doc, H index, etc tout ce qui se retrouve sous le label "excellence" estimé sur les critères actuels). Ils sont au pouvoir et ne comptent pas le lacher. Derrière eux, les bébés requins, cette génération élevée à la mamelle de la compétitivité. Mais nous ? Que nous est-il arrivé ? Nous nous sommes expatrié. Nous sommes finalement entré dans un "fleuron" de la recherche (quel qu'il soit) académique, où nous avons été étouffés par cette génération d'enfants gâtés. A notre époque, point d'ATIP, ou autre, point de postes fléchés pour le retour au bercail.
Notre recrutement signait notre arrêt de mort. Obtenir un poste chez Pierre, Paul ou Jacques suffisament vieux pour avoir déjà son labo, suffisament jeune pour ne pas vouloir risquer la concurrence avec ses "jeunes" recrues.
Génération à qui on reproche maintenant son manque d'ambition, son manque de performance (coté institutionnel) et à qui on reproche d'avoir joué le jeu et être rentré au pays (coté néo-expats). Je ne peux ni concurrencer les Baby boomers, assis sur leurs labos issus d'une époque que je n'ai jamais connu, ni les nouveaux entrants à qui on offre des moyens que je n'ai jamais pu approcher.
Pourquoi cette accroche ? Elle fait suite à une série de commentaires facebookiens (oui, j'avoue, je délaisse ce blog pour FB) sur l'état de la recherche en France. Le Piou m'assène que je n'ai que ce que je mérite (faible salaire, conditions de travail déplorables, pas de reconnaissance sociétale et j'en passe la liste serait longue), je n'avais qu'à partir aux US.
Certes. Mais les US, j'y suis allée (bien avant lui). Et je suis rentrée en France.
Pourquoi ?
Pour des raisons qui à l'aube de 2011 sont totalement ringardes.
En premier lieu, parce qu'il me semblait devoir quelque chose à notre pays. Après tout, c'est la Nation entière qui avait financé ma thèse, et plus précisément, qui avait permis à une fille d'ouvrier d'obtenir le plus haut diplôme décerné dans notre pays. Oui, je me sentais redevable. Oui, participer à l'effort collectif permettant de faire progresser la connaissance sous couvert de statut d'état me semblait honorable et redevable.
Je suis la reine des pommes ....
Quelques années plus tard, ceux là même que j'ai formé me méprisent et me disent que je n'ai que ce que je mérite, à savoir pas grand'chose.
Ni reconnaissance sociétale, ni salaire, ni honneur. Rien que le mépris d'une société qui évalue en fonction du poids salarial ou du prestige people-esque. Autant dire que quand on évolue dans le milieu de la recherche, on est juste un objet de ricanement (au mieux) ou de mépris.
Mais qu'en est-il de ceux qui sont à l'origine de ce post, les bénis générationnels, les baby-boomers ?
Pour le chercheur cinquantenaire, c'est un cauchemar. Ils sont au pouvoir selon des règles que nous n'avons jamais connu, et nous imposent des règles qu'ils n'auraient jamais rempli (post doc, H index, etc tout ce qui se retrouve sous le label "excellence" estimé sur les critères actuels). Ils sont au pouvoir et ne comptent pas le lacher. Derrière eux, les bébés requins, cette génération élevée à la mamelle de la compétitivité. Mais nous ? Que nous est-il arrivé ? Nous nous sommes expatrié. Nous sommes finalement entré dans un "fleuron" de la recherche (quel qu'il soit) académique, où nous avons été étouffés par cette génération d'enfants gâtés. A notre époque, point d'ATIP, ou autre, point de postes fléchés pour le retour au bercail.
Notre recrutement signait notre arrêt de mort. Obtenir un poste chez Pierre, Paul ou Jacques suffisament vieux pour avoir déjà son labo, suffisament jeune pour ne pas vouloir risquer la concurrence avec ses "jeunes" recrues.
Génération à qui on reproche maintenant son manque d'ambition, son manque de performance (coté institutionnel) et à qui on reproche d'avoir joué le jeu et être rentré au pays (coté néo-expats). Je ne peux ni concurrencer les Baby boomers, assis sur leurs labos issus d'une époque que je n'ai jamais connu, ni les nouveaux entrants à qui on offre des moyens que je n'ai jamais pu approcher.
Peut être dans ces conditions, est il temps de tirer sa révérence du monde de la recherche, et de passer à autre chose.
8 commentaires:
Houlalala, t'es folle ou quoi? D'ou t'as vu que je te meprise?
Je ne meprise personne. Et d'une. Et surtout pas toi. M'enfin t'es folle ou quoi?
Ce que je dis, c'est que y'a d'autres opportunites ailleurs que la recherche en France. Que tu peux raler (a raison) aussi fort que tu veux, rien ne changera. RIEN.
Ce que je disais sur FB (mais je veux pas griller mon anonymat de bloggeur) etait surtout destine a ton pote qui disait qu'en France, ils voulaient des trouveurs, pas de chercheurs.
Le genre d'humour qui me gave grave.
Pass'qu'encore une fois, c'est ce genre de manque de respect pour les chercheurs qui m'enervent.
C'est lui et les blaireaux de son espece qui n'a ce qu'il merite: une recherche Academique qui chaque annee est un peu plus a la bourre sur les autres.
Et malgre ceux qui comme toi, s'accrochent.
J'aurai bien aime tu vois pour m'acquiter de la formation -de pointe- que j'ai recue. Mais tu vois, "j'ai pas le dossier" (soit je suis pas assez bon, soit j'ai pas les contacts, soit les 2) pour rentrer.
MAis cette situation me rappelle etrangement quelque chose: le cas de mes potes ejectes avant l'entree en DEA. Eux non plus, ils n'avaient "pas le dossier". Et si tu vois ou ils en sont maintenant, j'oserais dire "heureusement pour eux".
Maintenant, peut-etre a ton epoque c'etait noble se battre pour la cause que tu decris, c'etait peut-etre ce que les anciens vous avez appris... Moi, ce qu'on m'a appris et DIT, c'etait "passe ta these et tire toi aux US, ici, c'est mort".
Ouais. Tu reprensentes certainement parfaitement la generation perdue. Mais c'est pas pour ca que je te meprise.
D'ailleurs si je te meprisais, tu serais pas sur ma liste des visites obligatoires a faire a chaque passage au pays.
Ce qui fait mal c'est que tu te bats encore pour une cause que plus personne ne respecte: ni le public, ni les politiques, ni meme toi, en fait...
La ou je suis pas d'accord, c'est d'arreter la recherche.
Le probleme, c'est pas le job. C'est le faire en France: "c'est mort, ici"...
P'tain Roberta: tirez-vous ailleurs! C'est pas les options qui manquent, merde!
Surtout pour quelqu'un comme toi!
(desole pour le style décousu: peux pas relire, pas le temps et 2 gosses a gerer en meme temps!)
Bon le Piou, je dois publiquement te dire que je suis désolée ... Tu fais un peu office de dommage "collatéral" sur ce coup.
C'est juste que tout ça est un peu "too much", arrive un moment où la coupe est pleine et un petit rien la fait déborder.
Et franchement, pour l'instant je considère l'arrêt de la recherche comme une option sérieuse. Parce que je ne suis pas dans une situation où l'expatriation est envisageable. Et que clairement en France c'est mort ... donc la conclusion s'impose.
ouuuh la la!
Ce post me semble malheureusement caracteristique de ce que j'observe en France en ce moment: il y a 5 ans apres ma these on ne m'a pas vraiment dit "va aux US c'est mort ici". Le discours, c'etait plutot "va aux US te monter un dossier beton pour revenir". Bon, j'ai eu quelques tatonnements pour comprendre en quoi consistait reellement un dossier "beton", mais les collegues francais restaient quand meme assez sereins sur le systeme en general malgre certains inconvenients, le manque de moyens affectant ma discipline moins que d'autres. Mais depuis cette annee, dans les confs, le mot d'ordre, c'est "grosse galere, surtout ne vient pas y mettre les pieds". De la part de bons chercheurs qui ont des "bons" postes permanents dans les grands organismes de recherche, y compris a des niveaux eleves, c'est vraiment inquietant!
Bon si je suis un dommage collateral, ca va.
J'ai cru pendant un moment que tu croyais que je te prenais pour une grosse naze...
Je dois avouer que, vu de l'extérieur, occuper un poste de CR ou de MCF actuellement en France fait maintenant plutôt penser à un sacerdoce qu'à un job de rêve. J'ai un immense respect pour tous ceux qui ont pris (ou prennent encore) la décision de postuler et d'accepter de tels postes, a fortiori dans le contexte actuel. Mais quand je vois par quelles galères sont passés ceux de mes amis qui ont réussi à décrocher un poste (certains après plus de 10 ans passés de post-doc en post-doc), et quand nous discutons de l'évolution actuelle du système français, je m'estime finalement heureux de n'avoir eu ni les compétences ni l'intelligence nécessaires pour poursuivre dans cette voie. Et je n'en respecte que plus ceux qui continuent, contre vents et marées, à y croire et à mener leurs recherches (y compris leurs recherches de financements!). May the force be with you.
Junior.
L'étranger, j'y suis allée... et j'en suis revenue. Stages, séjours longs pendant ma thèse, post doc... au moment de candidater j'étais passée par 4 labos dans 3 pays différents (dont 3 labos hors de France). Autant de facons de fonctionner. Autant d'avantages et de desavantages.
Le gros point positif que je retire de ça, c'est que j'ai vu du pays, enfin surtout des labos. Certes, un post doc bien payé dans un trou bien paumé au milieu du MidWest m'a aussi enrichie personnellement (pas réussi à dépenser plus de la moitié de mon salaire, donc retour en France avec un pécule). Mais j'ai rencontré des gens, vu des organisations, au-dela des projets sur lesquels j'ai bossé j'ai vu des façons de bosser sur ces projets... En gros, j'ai bouffé de l'expérience.
Sur Arte il y avait il y a quelques années des interviews de grands chercheurs francais. L'un d'eux (oops, son nom ne me revient pas...) disait qu'il avait été recruté "alors qu'[il savait] à peine lire et ecrire", en référence au parcours du combattant qu'il faut se taper aujourd'hui pour monter un dossier présentable. La concurrence a ouvert les vannes de l'inflation... il suffit de regarder l'age moyen des néo-recrutés actuels. La disparition de la limite d'âge du concours CR2 du CNRS et autres INRIA n'a pas aidé à freiner cette inflation.
Junior, autant qu'on soit clair d'entree: t'avais non seulement les competences ET l'intelligence de faire aussi bien -sinon mieux- que d'autres que je connais et qui y "reussi" a avoir un post de permanent. D'ailleurs la preuve, t'as reussi a rebondir. Et bien.
Pour la voie "royale", t'as pas eu de bol c'est tout*.
Ca fait aussi parti des choses qui m'ecoeure dans le systeme actuel: un mauvais avec un cul borde de nouille, il y arrivera. Un bon, sans le coup de pouce du destin il arrivera a rien. Et je dis pas ca pour te faire moussser. Malheureusement, j'en connais trop des comme toi.
*: ha et puis aussi, ta these, tu l'as faite solo, coco. J'oserai pas une seule seconde dire que j'ai fait le mienne sans aide. Ca compte aussi. Pass'que des mecs qui sortent de these avec 15 papiers, j'en ai vu. zero en premier nom. Mais bon.
Junior, je rejoins totalement le Piou. Tes compétences et ton intelligence n'ont rien à voir dans l'histoire*. La chance est un facteur non négligeable dans les parcours académiques (pour le coté obscur je ne sais pas). Cela dit, certains sont plus futés que d'autres pour provoquer la chance ... (et je fais partie des pas futés du tout).
* Je t'avouerai même qu'à l'époque, en terme de culture scientifique j'aurai plus parié sur toi que sur les deux autres (comme quoi, c'est con de parier sur l'avenir). Et 7 ans plus tard, je t'assure que le choix du parcours académique s'est avéré catastrophique pour la seule qui l'ai effectué.
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