mardi 4 novembre 2008

Le retour du foutage de gueule

Tout d'abord, en réponse à Aisling qui s'inquiète de savoir si un chercheur prodiguant quelques heures d'enseignement est rémunéré, je dirai que çà dépend d'où il enseigne...
Prenons un exemple que je connais bien (ma pomme pour ceux qui dorment déjà en lisant ces lignes). Si j'enseignais disons à Neverland, université où sévit Anthropopotame, non seulement cette université couvrirait mes frais de TGV, mais encore elle me verserait des espèces sonnantes et trébuchantes pour une prestation variant du médiocre au pas trop mauvais selon l'humeur de l'étudiant suivant le cours. Malheureusement pour moi, j'enseigne à l'université de la Mérantaise, attendu que je trouve plus simple de traverser le couloir pour accéder à la salle de cours que de dépendre de la SNCF pour réaliser le même exercice. Et bien c'est financièrement stupide, puisque les 8 hrs d'enseignement que je prodigue bon an mal an ne me sont pas payées. Rien, nada, juste la gloire. Et comme je fais partie d'une espèce particulièrement crétine, pour le même prix, je mets mes cours en ligne en ajoutant des informations pour ceux qui voudraient approfondir le sujet.

Mais reprenons donc l'analyse des promesses de lendemains qui chantent émanant de notre chère ministre (que 10 000 diodes éclairent ses pensées).
Un autre moyen de gagner plus pour le chercheur, serait de bénéficier de la prime d'excellence scientifique (celle là même qui va remplacer la prime d’encadrement doctoral et de recherche) au titre justement de l'excellence scientifique. Donc plus besoin d'enseigner, dans ce cas il suffit de collectionner les Science et Nature. On apprend aussi que:
Les lauréats de distinctions scientifiques internationales ou conférées par les organismes de recherche devraient naturellement bénéficier de la prime d’excellence scientifique, dont le montant pourrait alors atteindre 25 000 €.

On imaginera sans peine la joie d'Albert Fert de toucher 25 000 € après avoir reçu 500 000 € de la main du roi de Norvège Suède ...
Toutes ces bonnes nouvelles nous amènent à la fin de la page 14, et ... rien. On parle ensuite des personnels techniques, administratifs et des bibliothèques, du nouveau mode de recrutement des Maitres de Conférence (lié à l'application de la LRU), de l'amélioration de la carrière des Professeurs ...
Page 19, on retrouve un vague espoir qu'une solution est prévue pour améliorer les carrières des chercheurs "de base", sur le thème "La nécessité d’offrir des perspectives de carrière". Bon, je vous rassure, c'est plié en 5 lignes sur le document d'origine. Les voici:
Les maîtres de conférences peuvent naturellement postuler sur des emplois de professeurs libérés par le départ à la retraite de leur titulaire, mais les possibilités peuvent être augmentées en transformant des emplois vacants de maîtres de conférences en professeurs, sur la base des demandes formulées par les universités. Il en est de même pour les emplois de directeurs de recherche dont le nombre sera accru au bénéfice des chargés de recherche.

Ben voila, la solution est simple. Pour nous offrir des perspectives de carrière, il suffit de prendre des postes frais pour les jeunes, et les transformer en postes moins frais pour les vieux. Je suis vraiment désolée pour tous ceux qui espèrent obtenir un poste, mais il est très clair que l'amélioration des carrières des personnels de recherche (enfin de quelques heureux élus) se fera au détriment de leur recrutement.
Et voila c'est fini. Mais me dirons ceux qui ont survécu à la lecture de ces deux billets indigestes, le rapport fait 23 pages et tu n'en es qu'à la page 19 ... Naïfs que vous êtes. Les dernières pages sont consacrées aux promotions des PRAG, des BIATOS, et à la revalorisation des salaires des Présidents d'Université.
Ce qui tombe plutôt bien finalement, car je commençais à me lasser de la lecture de ce ramassis de solutions miracles à deux balles.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Euh, je ne sais pas si j'ai bien compris, Roberta, mais je crois que tu crois que mon université de Neverland me paye le TGV ? Non, non, juste les vols en compagnie de la Fée Clochette...

Roberta a dit…

J'avais bien compris ;-) Je dis juste que si MOI je me déplaçais pour donner les cours que je donne sur les berges de la Mérantaise, non seulement on me paierait le TGV mais en plus, je serais rémunérée en heures supplémentaires.
Alors que là, je fais de l'enseignement à l'oeil ...

Anonyme a dit…

Chere Roberta,
je suis un lecteur fidèle de votre blog que j'apprécie beaucoup.
Je me permets simplement de souligner et de corriger une petite erreur (déformation professionnelle oblige vous comprendrez!) : je ne pense pas que ce soit le Roi de Norvége mais plutôt celui de Suède qui file 500 000 euros à nos bons lauréats du Nobel! ;-)

Roberta a dit…

Honte sur moi ...
Bon ben voila ma prime d'excellence qui vient de me passer sous le nez!!
Je corrige tout de suite.

Anonyme a dit…

et le roi de Finlande, pendant ce temps, se tourne les pouces ?

Anonyme a dit…

Desolee d'etre bassement materielle, mais quel est l'interet pour vous de donner des cours non-remuneres? - A priori, meme les thesards evitent ce genre d'arnaque! Est-ce la gloire de l'enseignement? Est-ce la possibilite d'observer les etudiants pour recuperage potentiel eclaire d'etudiants de Master/These? Est-ce pour etoffer un dossier de qualif PR en cas de besoin? N'y a-t-il aucun moyen d'obtenir ces maigres avantages en etant justement remunere? Deja que les vacations sont payees modestement, et ce au mieux 6 mois apres le debut des cours, j'ai du mal a concevoir le volontariat generalise que vous decrivez. Meme si pour 8h eq TD par an, on peut se dire, "bon..." j'aimerai aussi savoir comment l'universite peut comptabiliser ce volontariat dans les heures effectives d'enseignement? Est-ce que les heures d'enseignement ne doivent pas correspondre au service de chacun des intervenants, PR, MCF, vacataires, moniteurs etc.?